Toulouse, chambre des comparutions immédiates, septembre 2025
Youssef G., né en 1992 au Maroc, comparait pour recel de carte bancaire en récidive. Le président résume les faits : « Une patrouille de la BAC vous croise un matin. Vous êtes connu de leurs services. Ils vous voient vous débarrasser d’un objet. Quand ils vont voir de quoi il s’agit, ils découvrent une carte bancaire au nom d’un autre homme. Contacté, celui-ci confirme que sa carte a été volée ou perdue alors qu’il était en boîte de nuit. »
Ce dernier n’est pas à l’audience et n’a pas porté plainte – vraisemblablement parce qu’il a récupéré sa carte, comme le souligne le procureur.
En garde à vue, Youssef G. confirme avoir passé la soirée dans la même boîte, mais ne reconnaît pas le vol. Le président poursuit : « Vous avez aussi dit que vous aviez consommé de minuit jusqu’à la fermeture. Quinze bières et des flashs de vodka… Je n’ai pas beaucoup d’autres éléments sur les faits. »
Pour ce qui est de son parcours, le président précise qu’il est arrivé en France à six ans :
« Mais votre casier judiciaire, lui, se remplit depuis 2012. Vingt mentions ! Violence sur des personnes dépositaires de l’autorité publique, vol, refus d’obtempérer, escroquerie, recel, conduite sans permis et sans assurance… Des allers-retours avec la prison, vous ne faites que ça !
‒ J’essaie de changer.
‒ Vous avez essayé quand exactement ? La dernière infraction, c’était en 2024 ! Et vous êtes sorti en mai dernier. Pour le reste, vous êtes en formation pour devenir animateur sportif, vous touchez le RSA, vous consommez tous les jours de l’alcool.
‒ Non, pas tous les jours !
‒ C’est pourtant ce que vous avez dit dans l’enquête sociale rapide. L’enquêteur ne l’a pas inventé. Qu’est-ce que vous faisiez dans cette boite ?
‒ J’ai rejoint un ami.
‒ Vous ne travaillez pas, mais vous avez les moyens de passer des soirées entières à consommer dans les bars. »
Ce court échange a visiblement permis au procureur de se forger des certitudes : « Ce n’est pas l’alcool qui le fait voler. En réalité, c’est un voleur. Douze mentions sur son casier concernent le vol et trois autres le recel. »
Il enchaîne avec l’éternel couplet sur la mansuétude de la justice : « On a tenté de l’épauler : trois sursis, des travaux d’intérêt généraux – non exécutés d’ailleurs. Ça a été des échecs… La prison va s’ouvrir pour Monsieur. Cela protégera les consommateurs – du moins pour un temps. »
Il demande 18 mois de prison, dont neuf mois de sursis probatoire :
‒ C’est une peine qui est adaptée aux faits mais surtout à sa personnalité.
Pour l’avocate, il y a un doute sur le fait que Youssef G. ait vraiment détenu cette carte : « Je vous épargnerai les éléments de personnalité étant donné que je demande la relaxe, mais il est certain qu’il rencontre de nombreuses difficultés : il habite chez ses parents et s’occupe de son père qui a Alzheimer et Parkinson. »
Youssef G. est déclaré coupable et condamné à six mois de prison avec mandat de dépôt.
Alors que les policiers l’emmènent, l’air un peu sidéré, il s’adresse au président. On ne saisit pas ce qu’il dit, mais on entend nettement la réponse du juge : « Je me dispense de vos commentaires et vous encourage à garder le silence. »



