Demander un délai pour préparer sa défense et se retrouver en prison

2 février 2022 | Émissions de radio

En comparution immédiate, la première question posée à la personne poursuivie est la suivante : « Voulez-vous être jugée tout de suite ou sollicitez-vous un délai pour préparer votre défense? »

Mais si elle demande un renvoi, une autre question va se poser : sera-t-elle laissée libre jusqu’à l’audience ou sera-t-elle placée en détention provisoire ?

La loi encadre normalement cette pratique : un⋅e prévenu⋅e ne peut être mis⋅e en détention provisoire que si c’est le seul et unique moyen d’éviter le renouvellement de l’infraction et de s’assurer qu’il ou elle viendra à son procès.

Dans les faits, quand la personne à un casier judiciaire, ou bien qu’elle n’a pas de travail, pas de foyer ou pas de papiers, elle sera envoyée en détention provisoire. Pour le dire autrement, les prévenu⋅es de compa qui demandent un renvoi iront préparer leur défense en prison.

On lira des morceaux de Trois renvois.

La Sellette anime une chronique radio tous les derniers vendredis du mois dans l’émission de l’Envolée. Vous pouvez écouter l’émission de janvier 2022 sur leur site.

À écouter aussi

Le plaider-coupable à la française

Créée en 2004, la procédure de comparution immédiate sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC, ou plaider-coupable) a été conçue pour accélérer le traitement des affaires et désengorger les procédures classiques – comme toujours au dépend des droits de la défense. Une succession d’élargissements de son champ d’action a conduit à la fois à ce qu’elle soit de plus en plus utilisée et à alourdir les peines distribuées. Des modifications récentes permettent aujourd’hui aux parquets d’y envoyer des personnes immédiatement après leur garde-à-vue et de proposer des incarcérations avec mandats de dépôt – les prévenu⋅es qui s’avisent de refuser sont envoyé⋅es en comparution immédiate.

+ la chronique musicale sur le Juge Dread de Manu Makak, ex-taulier de Black Mirror.

+ la rubrique actualité sur le renouveau de la guerre à la drogue.
Sur le même sujet, vous pouvez aussi écouter notre émission précédente : French correction (la guerre à la drogue version française)

La justice restaurative : pour qui, pour quoi ? 

Inscrite dans la loi depuis 2014, la justice restaurative (JR) rencontre pourtant de grandes difficultés à se développer dans le girond de la justice pénale en dépit des effets d’annonce. Le manque d’engagement de l’État et le scepticisme des magistrat·es chargé·es d’informer le public de l’existence de mesures de JR sont entre autres responsables de cette situation. Pour le dire autrement, ce manque de succès manifeste aussi l’incapacité de la Justice à envisager des mesures autres que répressives.

Ressources évoquées dans l’émission :

Une chronique de La Sellette : « Elle attend quoi ? De faire un orphelin ? », qu’on peut aussi écouter indépendamment.

L’Institut français pour la justice restaurative (www.justicerestaurative.org) a mis en ligne de nombreuses vidéos sur sa chaîne Youtube, et notamment le webinaire 12 : Les développements de la justice restaurative en France.

« Justice restaurative, justice transformative : des alternatives ? Entretien avec Gwenola Ricordeau », dans CQFD

Les aménagements de peine

Les aménagements de peine sont censés favoriser la réinsertion des personnes condamnées en leur permettant d’exécuter tout ou partie de leur peine sous une autre forme que l’incarcération : liberté conditionnelle, semi-liberté, placement à l’extérieur ou bracelets électroniques, autant d’« alternatives à l’incarcération » qui ne bénéficieront cependant que rarement aux personnes les plus précaires.

En comparution immédiate, de plus de plus de personnes sont condamnées à effectuer de la détention à domicile. À y regarder de plus près cependant, le bracelet électronique vient souvent remplacer le travail d’intérêt général ou le sursis probatoire plutôt que de se substituer à la prison. Si bien que le nombre de détenu·es et celui des personnes sous bracelet augmentent de concert.

Ressources évoquées dans l’émission :
Deux chroniques de La Sellette : Esprit d’entreprise et La clémence du tribunal
Camille Polloni, Le juteux marché du bracelet électronique confié à Thales

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